J’avais besoin d’exorciser quelque chose qui me terrifie : l’abrogation du mariage pour tous et de l’adoption pour tous. Alors j’ai beau me dire qu’on a gagné la bataille de l’opinion, qu’on a gagné une bataille pour l’égalité, qu’on a gagné une bataille pour la justice, une part de moi a peur. Et si effectivement la droite revenait sur le mariage pour tous, et en particulier sur l’adoption pour les couples homos. J’ai voulu faire la liste des promesses à droite d’abrogation et de réécriture de la loi Taubira, et rien que le faire m’a glacé le sang.
Alors voilà, j’aimerais dire que ça ne m’atteint pas mais c’est faux. Une part de moi est terrifiée, et une part de moi se demande « si je n’ai pas adopté d’enfant d’ici 2017 avec mon conjoint, est-ce qu’on pourra un jour être reconnus aux yeux de la loi tous les deux parents de nos enfants ? » Parce qu’une chose est claire : parents, nous le serons. Alors pourquoi vouloir nous faire vivre dans l’insécurité de ne pas avoir une reconnaissance de notre famille ? Pourquoi vouloir nous faire vivre dans l’insécurité de se dire c’est maintenant ou jamais ? Devra-t-on assister à des milliers de mariages en 2017, avant qu’il ne soit trop tard ? Doit-on vivre jusqu’à 2017 avec l’impression d’être coincé dans un sablier, d’être sur le point d’être submergé, noyé sous le sable ?

Je lis des déclarations d’Aurore Bergé et de « progressistes » à droite qui soutiennent un candidat à la présidence de l’UMP qui promet l’abrogation du mariage pour tous en nous jurant qu’ils continuent à soutenir la loi Taubira et qu’on ne peut pas leur reprocher de ne pas être avec nous. C’est trop facile : vous avez choisi le camp de ceux qui nous font vivre dans la peur, vous avez choisi le camp de ceux qui menacent nos familles, vous êtes complices car vous fermez les yeux. Le calcul est simple : s’ils ne perdent pas votre soutien en s’opposant à nos familles mais qu’ils en gagnent d’autres, pourquoi ne le feraient-ils pas ? Nous sommes sacrifiés pour quelques voix, pour un populisme dégueulasse, et que vous l’assumiez ou pas, vous en êtes les complices.